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"Néolibéralisme?" partie 1


Introduction


En me lançant dans le projet de ce site, j’avais pour idée d’arriver à mêler une forte vulgarisation théorique axiologiquement neutre et une tout aussi forte formation politique engagée. Je pense que les deux logiques peuvent aller ensemble si elles sont unies dans une structure claire et explicite. Néanmoins, dans les articles qui se sont succédés jusqu’ici, j’ai laissé la partie théorique prendre beaucoup de place sur la partie politique.


Alors, comprenez-moi, je pense qu’avoir laissé la partie politique assez faible est une bonne chose et je ne m’en veux pas de ce choix. Néanmoins, durant ce mois d’élections en Belgique, j’entends de plus en plus de personnes qui expriment des idées politiques fortes et marquées et j’ai envie de faire de même!


Mais, malgré mon envie, encore faut-il trouver un thème qui s’y prête: Pas trop complexe niveau théorique, suscitant de fortes réactions et entrant dans l’actualité…

Je cherche donc un thème et je me tourne vers les différents médias: J’allume télévisions, radios, ordinateurs et je me plonge dans tout ce que je peux percevoir… Je suis alors sorti de ma concentration par un mot, sorti comme une insulte du poste de radio: “néolibéralisme”!


Je suis déjà fort sensibilisé à ce sujet, je vois ce qu’est le libéralisme et ce qui semble être sa version extrême. Mais, pour autant, je ne vois pas forcément pourquoi ce terme est tant utilisé pour le moment. Quoi que, je sous-estime peut-être le néolibéralisme en ne l’incarnant que dans un désinvestissement du public. Peut-être que le néolibéralisme est composé de logiques bien plus fines et profondément ancrées dans nos sociétés.


Nous allons donc chercher à voir, dans une première partie, ce qui se cache de plus profond dans le néolibéralisme et, dans une seconde partie, s’il est possible de retrouver ces logiques lors des élections, moment clef de nos démocraties actuelles.

Les origines


Le néolibéralisme est une doctrine politique dont la compréhension est trop souvent limitée à l’implication économique de l’État. Pourtant, cassons directement un mythe, il n’aurait jamais été possible qu’une politique basée sur aussi peu de contenu ne s’installe avec tant d'ampleur ni ne déchaine les passions au point que nous connaissons aujourd’hui. Certes, le désinvestissement de l’État de toute forme d’économie est un point central du néolibéralisme. Néanmoins, il est à celui-ci ce que la réduction des émissions de CO2 est aux mouvements écologiques de l’Est: Une anecdote symbolique mais une anecdote dans la pluralité des mesures prônées.

Pour pouvoir entrevoir la définition et une compréhension plus large du néolibéralisme, je vous propose un voyage en trois étapes, trois temps, qui nous permettront de comprendre la situation actuelle.

Le libéralisme


Le néolibéralisme se revendique de la descendance du libéralisme. Il s’en veut être le renouveau. Il serait donc intéressant d’entrevoir quelques éléments du libéralisme.


Avant de commencer sur ce point, un avertissement très classique à propos du libéralisme est nécessaire: Le libéralisme est à comprendre dans le temps où il a émergé, à savoir la fin de l’absolutisme. Bref, dans un siècle où le pouvoir est détenu par un homme et où les allégeances personnelles, originaires du féodalisme, n’avaient laissé place qu’à un système de privilèges extrêmement marqués différenciant les gens, où va émerger un désir émancipateur de se libérer des soumissions à d’autres hommes.


Deux institutions vont alors se mettre en place avec des fonctions bien particulières: le Parlement souverain et le marché libre. Ces deux institutions semblent ne pas suivre les mêmes logiques et, pourtant, le libéralisme leur donne à toutes deux une valeur importante.

Le Parlement va être le possesseur du pouvoir législatif et souverain. En quelque sorte, il va récupérer la majeure partie des pouvoirs du Roi. Ce n’est pas quelque chose d’exceptionnel puisque déjà, avant le libéralisme, l’absolutisme opérait une scission entre le Roi physique, mortel, et la fonction royale, divine et immortelle. Néanmoins, le libéralisme va exclure la possibilité qu’un homme dirige les autres. Cela sera donc une pluralité de personnes qui ne parleront pas en leurs noms propres mais qui représenteront le peuple. C’est à ce moment là que les élections deviendront un moment central de la vie publique. En effet, de temps à autre, le souverain, c’est-à-dire le Parlement, doit remettre sa composition dans les mains d’une plus large catégorie de personnes (qui aujourd’hui nous semblerait dérisoire) pour rester représentatif et, par ce fait, ne plus soumettre des hommes à des décisions qui ont été prises sans les représenter, dans les définitions de l’époque.

Néanmoins, le Parlement ne peut pas tout faire. En effet, déjà à l’époque, le législateur se retrouve bien trop lent que pour gérer des activités rapides comme par exemple l’économie. En effet, comment, sans soumettre un homme à un autre, permettre un bon déroulement de l’économie à l’échelle d’une nation? Une théorie va alors émerger: Si les hommes font ce qu’il leur est profitable, cela sera profitable à la société. Quand le Roi gérait, pour sa propre richesse, le système fonctionnait malgré ses imperfections, alors si chaque homme suit ses intérêts propres le système va encore subsister, mais en mieux. Il faut néanmoins créer un lieu où tous les hommes peuvent venir librement constater ce que les autres ont à offrir économiquement. Dans ce lieu de rassemblement, chacun pourra conclure les marchés qui l’arrangent le mieux, qui lui réussissent le mieux. Puisque le marché est exclusivement économique, la réussite va se calculer avec la valeur étalon de l’économie: l’argent.


Les deux institutions s’opposent dans leurs fondements mais ne restent pas pour autant toutes les deux libérales. En effet, le Parlement est un lieu de décisions collectives qui vont pouvoir s’imposer à tous alors que le marché est un lieu de décisions individuelles qui ne concernent que les parties prenantes. Pour autant, les deux sont des lieux où l’on fait société, c’est-à-dire où l’on se rassemble dans un cadre normatif commun, qui permet d’éviter une soumission individuelle.

Évidemment, ce système prôné par le libéralisme d'antan possède de nombreuses discordances entre autres sur la définition de la représentation du peuple mais dans la situation où il émerge, il ne fait pas si mal.

La grande transformation


Le libéralisme, comme nous venons de le voir, garde donc certaines caractéristiques de la société traditionnelle notamment en ce qui concerne la présence de valeurs collectives. Ce rôle est assumé par un parlement qui remplace simplement le souverain. Le marché est mis en place uniquement là où le Parlement ne pourrait agir collectivement, c’est une sorte de plan bis. Néanmoins, une transformation en deux temps va avoir lieu, le premier temps créant un libéralisme plus radical et le second basculant dans le néolibéralisme. Étudions d’abord le premier mouvement.


Le premier mouvement se fonde sur la réflexion suivante: Puisque nous avons posé que, dans le marché où les choix individuels s’expriment, ce qui est bon à un individu est bon à la collectivité, et puisque dans le marché il y a ceux qui gagnent et ceux qui perdent en fonction de leurs choix, et qu’il est bien que ceux qui font les bons choix gagnent et que ceux qui font les mauvais choix perdent, alors, la société collective, c’est-à-dire la figure de l’État et du Parlement à qui bénéficie le marché, ne doit pas interférer dans les domaines du marché. En deux mots, le marché libre est positif pour la collectivité alors la collectivité ne doit pas y interférer.

Va donc émerger de cette réflexion une sortie des marchés de la société sociale, un désencastrement, qui va avoir une multitude de conséquences. Tout d’abord, l’État ne pourra plus intervenir dans le marché et doit le laisser faire. La concurrence personnelle va être mise en avant et la présence de gagnants et de perdants va être valorisée. Enfin, puisque le marché concerne exclusivement l’économie, la réussite ou l’échec ne se mesureront plus qu’en bénéfices financiers.

Le néolibéralisme


La grande transformation, ou du moins son premier mouvement, nous laisse dans une situation binaire: D’un côté, il y a le Parlement, qui prend des décisions collectives pour la collectivité, car le centralisme permet d’éviter les dérives des l’asservissement humain. De l’autre, il y a le marché qui prend des décisions individuelles pour des individus, car ce qui est bon pour l’un est bon pour la collectivité. Deux paradigmes cohabitent sur un pied d’égalité dans des aires matérielles différentes: l'économie pour le marché, la société pour le Parlement.


Néanmoins, la séparation entre les paradigmes n’est pas aussi délimitée que ce que notre explication tend à faire penser. En effet, l’économie ne peut complètement exister hors du collectif et, parallèlement à cela, la société ne peut exister sans rapports avec le marché. Prenons l’exemple de l’enseignement: C’est une notion de la société qui va influer sur les caractéristiques des travailleurs, donc sur le marché. Mais, d’un autre côté, l’enseignement consomme des ressources car il faut nourrir professeurs comme étudiants sans parler des supports de cours, bref, toutes des productions du marché qui viennent alimenter la société. Les deux paradigmes se rencontrent et doivent travailler ensemble. Or, l’un des enseignements de l’épistémologie est la présence assez systématique de “guerre des dieux”, c’est-à-dire de lutte des paradigmes.


Dans ce contexte, le néolibéralisme est le mouvement qui pense comme positive la réunification du social et de l’économie en incorporant le premier dans le second. C’est donc un renversement par rapport à la situation initiale où l’économie était contenue dans le social.

Ce renversement va avoir de nombreuses conséquences. Pour être plus précis, il va élargir les conséquences de la séparation de l’économie et du social à tout le social. Ainsi, l’État va devoir pour toute matière laisser sa place au marché et ne plus interférer. Dans ce marché, la concurrence est valorisée par la présence de gagnants, qui doivent prospérer, et de perdants, qui doivent disparaître. L’indicateur de réussite sera exclusivement le gain d’argent. Ce sont donc les caractéristiques mises en exergue par le marché exclusivement économique qui vont s’appliquer à l’ensemble de la société en considérant que tout est économique.

Dans une telle logique, le désinvestissement de l’État est important. En effet, puisque l’État doit laisser chacun perdre ou gagner, il n’a que peu de raisons de subsister. Néanmoins, et même si ce ne serait pas le système privilégié par le néolibéralisme, l’État pourrait encore posséder des entreprises et en tirer des bénéfices. En effet, si l’État se soumet lui-même aux règles du marché, si les entreprises publiques se calquent le plus possible sur les entreprises privées, celles-ci peuvent être tolérées. Le désinvestissement public n’est donc qu’une anecdote face à toutes les logiques de concurrences, de gains, de pertes, de disparitions et d’argent, et c’est une trop rapide réduction que de ne voir que celui-ci.


Prenons l‘exemple du marché des transports pour expliquer nos propos. Le néolibéralisme ne peut se contenter de la notion de transport public. En effet, ceux-ci comportent des coûts et donnent des bénéfices aux entreprises qui voient leurs travailleurs arriver plus vite dans leurs bureaux. C’est donc de l’économie, et il faut transformer les transports publics en marché des transports. L’exclusivité des sociétés publiques n’est à conserver que dans des cas extrêmes. Dans les autres cas, il faut au pire ouvrir le marché à la concurrence et, au mieux, privatiser l’ancienne société publique. Ensuite, il faut regarder ce qui est utile pour la collectivité. Ce qui est utile à la collectivité étant, dans le marché, ce qui est utile à la société privée (les noms ne sont pas choisis au hasard). Or, pour mesurer ce qui réussit ou échoue pour la société privée, le marché utilise l’indicateur exclusif de l’argent. Les lignes qui comptent seront donc les lignes qui gagnent de l’argent et il sera nécessaire d’optimiser le rapport en argent. Pour les transports, il faut donc voir les alternatives et leurs coûts. Si le coût des alternatives est inférieur à la marge bénéficiaire, il faut arrêter la ligne. C’est le cas des lignes locales dans les transports qui coûtent plus que la voiture, même si la qualité de service ou environnementale n’est pas la même. Ensuite, quand il faut fixer son prix sur ceux des alternatives et l’adapter en fonction des situations. Par exemple, la voiture est plus coûteuse en centre-ville à cause du manque de place, les transports en centre-ville vont donc coûter plus cher qu’en périphérie. Identiquement, les trajets plus longs coûtent plus cher. A titre d’exemple, à la RATP (transports en commun parisiens), l'abonnement annuel pour les deux zones les plus au centre de la ville s’élève à 731,50€ alors que pour les deux zones les plus éloignées du centre il revient à 634,70€. Remarquez que pour traverser librement tout le réseau de la même ville ou de sa périphérie, son aire exclusive d'influence, vous devrez débourser 1204,50€.





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